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La crise n'a pas remis en cause les modèles mathématiques utilisés dans les banques

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La crise n'a pas remis en cause les modèles mathématiques utilisés dans les banques Empty La crise n'a pas remis en cause les modèles mathématiques utilisés dans les banques

Message par Napoléon Ven 23 Oct - 22:46

Trop simples, les modèles mathématiques n'ont pas su prévenir l'effondrement de la finance mondiale, résumaient les spécialistes de mathématiques financières réunis en début d'année, à Paris, par l'institut Europlace (Le Monde du 28 mars). Le temps passe, et rien ne change, semble-t-il.

Benoît Mandelbrot, mathématicien de génie auteur de la théorie des fractales, alerte depuis les années 1960 sur les dangers des modèles mathématiques inspirés de l'étude du mouvement brownien, utilisés en finance. Mais ses travaux ne semblent guère davantage pris en compte maintenant que la crise est passée, nous a-t-il confirmé lors de son passage à Paris, le 11 octobre.

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Certains de ses collègues, mathématiciens ou physiciens, dissidents du modèle brownien, et qui espéraient aussi que la crise allait enfin donner du crédit à leurs travaux, confirment. Ils redoutent qu'une crise financière aussi grave ne survienne dans les prochaines années et se désolent de voir que les modèles alternatifs qu'ils proposent ne soient pas plus utilisés.

"La crise financière est comparable à un court-circuit électrique. Un réseau électrique périmé, en l'occurrence une modélisation mathématique inadaptée, a provoqué un court-circuit qui a déclenché un incendie ; c'est la crise économique, résume Christian Walter, chercheur à l'EM Lyon et coauteur du livre Le Virus B, crise financière et mathématiques (Seuil, 2009, 128 p., 14 euros). Les pompiers ont inondé les marchés avec des liquidités. Et maintenant, on repeint la maison, mais sans refaire le réseau électrique ! Le court-circuit peut se reproduire. Ces outils sont dangereux."

"ILLUSION DE MAÎTRISE"

Laurent Calvet, professeur de finance au groupe HEC, qui a longtemps travaillé à l'université américaine Yale (Connecticut) avec M. Mandelbrot, précise : "Les techniques browniennes peuvent être dangereuses lorsqu'elles sont appliquées sans précaution, car elles donnent l'illusion de la maîtrise du risque." M. Calvet dit craindre "qu'une majorité des banques ne continue à utiliser des modèles basés sur le mouvement brownien à volatilité constante (c'est-à-dire qui gomment les grandes variations quotidiennes des prix des actions), alors que des techniques beaucoup plus précises ont été développées au cours des trente dernières années."

Ce danger est d'autant plus important que non seulement les banques, mais aussi leur environnement, et en particulier les instances de régulation, n'ont que ce modèle en tête. Pour M. Walter, la théorie du modèle brownien en finance agit en effet tel un virus. Ce qui fait que "les acteurs étatiques, les régulateurs sont influencés. La conception brownienne imprègne les esprits."

Frédéric Abergel, professeur titulaire de la chaire de finance quantitative à l'Ecole centrale de Paris, est d'autant plus inquiet que "l'industrie des dérivés de crédit semble repartir. Et que l'on n'observe pas de mesure, ni de tendance lourde, qui permette de dire que dans cinq ans une crise ne va pas se reproduire", dit-il, de retour de Budapest, où un colloque sur les risques financiers a réuni, début octobre, quelques-uns des meilleurs experts du sujet. "Aucun programme de recherche majeur sur le risque systémique n'est entrepris", alerte-t-il.

Pourquoi les institutions financières s'enferrent-elles de la sorte ? Par confort intellectuel, disent les uns. Mais aussi par intérêt, disent les autres. Car des modèles plus réalistes obligeraient les banquiers à reconnaître qu'ils prennent plus de risques, et donc qu'ils doivent avoir plus de réserves ; ce qui est plus coûteux et réduit les bénéfices d'autant.

La rapidité avec laquelle certaines banques ont renoué avec les bénéfices, et les rémunérations record dont vont bénéficier les cadres de Wall Street, viennent opportunément appuyer ce raisonnement.
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